Notre démarche stratégique de transformation et de rassemblement, sur la base d'un bilan de la période écoulée et des enjeux de la période nouvelle - Congrès PCF

Communisme : C'est le chemin qui préfigure la visée

Le communisme c'est un chemin et une visée. Évoquons d'abord la visée : c'est notre rêve, notre utopie... En finir avec la société capitaliste en instaurant une société humaine, démocratique, égalitaire... Nous avons la conviction que le capitalisme menace la survie de la planète ce qui nous pousse à dire que « le dépassement du système capitaliste est à l'ordre du jour, il connaît une vraie actualité historique » (Pierre Laurent, PL). Mais cette nécessité objective se heurte à des obstacles subjectifs considérables. L'incrédulité en la possibilité de se débarrasser du capitalisme domine, tant pèse l'échec historique du « socialisme réel ». Quand bien même les gens ne savent pas exactement de quoi il en retourne, il n'est plus à prouver que cet échec pèse lourdement sur les conscience. Retenons que dans l'enquête Viavoice de janvier 2018, les opinions favorables du communisme, du parti communiste sont respectivement de 12% sur le total des sondés et de 25% chez les sympathisants de gauche et 13 et 29. S'ajoute l'image peu reluisante que la Chine, la Corée du Nord et Cuba dans une moindre mesure, donne du communisme. La visée du communisme est brouillée. Le sous estimer, voire le nier, serait totalement contre productif. Réhabiliter la visée communiste C'est par le chemin que nous pourrons réhabiliter le sens et la portée de la visée communiste. Or, force est de constater que le chemin est plus que périlleux. On ne peut faire abstraction que les valeurs progressistes de par le monde sont au plus bas, de même que les partis qui s'en réclament. Où que l'on se tourne, c'est le marasme politique. Juger de la situation du PCF sans la situer dans le contexte général européen, cela n'a pas de sens. Quand je lis dans la déclaration « C’est le moment ! » publiée le 8 février que « L'idée communiste, qui a été le moteur de l'engagement de générations de militants, frappe à la porte du XXIe siècle », c''est confondre ce qui est objectif avec sa perception subjective. Ce que PL traduit en ces termes : « la possibilité de ces temps nouveaux n’adviendra, ou n’adviendra pas, car il n’y aucun automatisme logique en la matière ». Certes, des forces de résistance et de contestation, existent mais elles sont limitées et désunies. Elles n'agissent le plus souvent qu'en réaction aux attaques de l'adversaire. Il faut alors analyser cette situation le plus lucidement possible pour décider du chemin et s'y engager. Une double démarche stratégique Certains estiment que ce qui compte ce serait le projet. Avec de bonnes propositions, une bonne pédagogie, de bonnes directions, nous serions assurés de parcourir un bon bout du chemin. Encore faudrait-il que nous disposions de ce bon projet, mais même si c'était le cas, ce dont je doute, je ne serais pas d'accord. Nous savons par expérience que nous ne surmonterons pas le scepticisme des gens en nous contentant de leur faire miroiter le bien fondé d'un projet. Ce qui est décisif, c'est de faire vivre ses propositions. Et pour cela, il faut selon moi, que notre démarche stratégique s'exerce dans deux directions 1- les luttes qui mettent en cause le système. J'y reviendrai. 2- ce que PL désigne comme «  les pratiques et les expérimentations sociales qui cherchent à anticiper une nouvelle manière de développer la société ». J'y reviendrai. Les batailles à mener tou.te.s ensemble Pour les luttes, je reprends PL, « il faut entreprendre le travail d'identification des batailles potentiellement transformatrices ». J'ajoute pour ma part, des batailles à mener avec le plus grand nombre possible d'organisations concernées (syndicats, associations, partis), autant de batailles dont on montrerai aisément que ne s'y distingue pas le social du sociétal. Des batailles à mener avec toutes les organisations concernées, non pas côte à côte, mais ensemble. Non pas en nous y dispersant, non pas seulement en y étant d'actifs adhérents, mais en revendiquant la place spécifique du PCF. Ces batailles « potentiellement transformatrices » sont selon moi : féminisme, antiracisme, Palestine, migrants-réfugiés, écologie. Evidemment, toutes les questions liées au travail, à l'emploi, à la formation, à la protection sociale, aux services publics... relèvent de ces batailles. Mais, ces thématiques relèvent du champ d'intervention des syndicats, or, Chartes d'Amiens oblige, les partis ne peuvent tout au plus que servir de relais, et pour le moment il est exclu qu'elles puissent être menées ensemble, tout au plus côte à côte. Je suis persuadé que c'est un énorme manque à gagner. Sur toutes les autres batailles, notre spécificité, en plus de notre capacité de mobilisation, c'est d'être aptes à leur donner un contenu de classe. Faire admettre notre spécificité de parti communiste Nous devons faire admettre cette spécificité. Ce n'est pas évident tant les préventions à l'égard des politiques est grande. Mais, nous avons des analyses suffisamment proches des autres organisations pour mener ces combats avec elles. C'est le cas de : féminisme, antiracisme, questions internationales et migrant.e.s-réfugié.e.s. Çà ne l'est pas pour les questions qui relèvent de l'écologie. Et je regrette de devoir dire que ce sont nos positions qui n'aident pas à entreprendre un travail commun. Ce n'est pas par un hasard si lorsque dans le sondage Viavoice, dont j'ai déjà parlé, on demande d’identifier le combat communiste, le mot « environnement » n’est cité que par 2 % des sondés. C'est un sujet particulier que je n'aborde pas ici. J'ai donné mon avis dans un texte que j'ai publié dans le chantier écologie intitulé « De l'irruption des acteurs sociaux dans les grands projets ». Anticiper une nouvelle manière de développer la société J'en viens sur ce que devrait être la deuxième direction de notre démarche stratégique. Dans une autre contribution « Les communs : une contribution à la transformation sociale »que j'ai publiée dans le chantier « stratégie, rassemblement », je suis parti du fait que le modèle fidèle à la tradition marxiste selon lequel c'est l’État qui, pour l'essentiel, assure la régulation de la création des richesse et leur distribution rappelait trop le dirigisme étatique qui a lamentablement échoué dans le monde soviétique. Et qu'au surplus, sa crédibilité était d'autant plus atteinte que pour convaincre de son efficacité, on ne pouvait recourir qu'à des arguments théoriques, sans qu'il soit possible de s'appuyer sur des expériences réussies qui pourraient en faciliter l'adhésion. J'ai donc avancé l'idée qu'il fallait valoriser de nouvelles pratiques économiques et d'expérimentations sociales qui échappent à la logique libérale et aident à accréditer l'idée qu'une alternative au capitalisme est possible. En quelque sorte ce que PL nomme «  les pratiques et les expérimentations sociales qui cherchent à anticiper une nouvelle manière de développer la société ». J'ajoute que même si on peut douter qu'à elles seules elles puissent figurer l'alternative au capitalisme, elles peuvent certainement y contribuer de façon non négligeable. Et aussi, dans l'immédiat, elles devraient faciliter la compréhension de ce que pourrait être une gestion non étatisée de certains secteurs économiques et l'invention de modalités d'autogestion de secteurs stratégiques productifs et financiers nécessitant une intervention soutenue de l'Etat. Le rassemblement et le parti sont indissociables Cette double démarche stratégique doit s'accompagner de la question des pouvoirs à conquérir au niveau étatique, question complexe qui ne se réduit pas à celle du gouvernement. Les communistes ont posé depuis longtemps que la conquête des pouvoirs se fera par la voie démocratique et qu'elle passe donc par les urnes. Il n'a pas de plan B. Je ne vois pas comment le plan, le seul et unique, pourrait faire l'économie d'une recherche de constructions politiques et donc de la question du rassemblement. Est-il besoin de préciser que le rassemblement ne peut que s'inscrire dans le processus de la transformation sociale et que c'est un faux problème que de poser la question « le rassemblement pour quoi faire ? ». Si une chose me semble évidente, c'est que parti et rassemblement dont indissociables. Aussi, écrire comme dans le texte « C'est le moment ! » que « chercher à rassembler sans affirmer nos idées et sans rapport de force », ce qui revient à considérer que le parti doit d'abord recouvrir des forces avant que de songer à contribuer à la construction d'un rassemblement, cela est pour moi inconcevable. Tout autant qu'un rassemblement réduit à un PCF hégémonique ou inversement à un PCF qui s'y déliterait. Du coup, je ne vois pas comment traiter de cette question sans le faire autrement que ne le préconise PL : « Pour affronter les constructions politiques nouvelles, nous devons aussi discuter des forces politiques avec lesquelles nous ambitionnons de travailler. Pas nécessairement parce que des alliances immédiates seront possibles avec toutes, mais pour identifier ces forces afin de savoir si, oui ou non, nous envisageons des coopérations possibles avec elles.Aujourd’hui, je crois que parmi ces forces, il y a FI, même si nous n’en partageons pas la démarche, d’autres anciens alliés du Front de gauche, comme Ensemble, aujourd’hui divisé, ou République et socialisme, mais aussi Génération-S, le MRC, des forces d'extrême gauche, des forces écologistes, et des forces issues de l'écroulement du PS, car rien ne permet aujourd’hui de dire clairement où se situera le PS à l’issue de son congrès. » Roger Hillel