Le Parti et les classes populaires, au travail comme dans la cité - Congrès PCF

Numérique, nouvelles formes de travail et salariat Contribution de communistes de Paris 12ème.

Dans le cadre de la démarche d’éducation populaire animée par la section du Parti communiste Paris 12ème, des communistes et des habitants du 12ème arrondissement de Paris ont assisté à une conférence-débat sur les nouvelles formes de travail induite par le numérique. Cette conférence débat a notamment permis d’éclairer les nouvelles formes de travail et d’exploitation induites par les plateformes numériques dite d’ « intermédiation de service » de type Uber ou Deliveroo. En prenant l’exemple des « livreurs » Deliveroo ou des « chauffeurs » Uber, les intervenants ont montré comment ces plateformes numériques créaient des situations de travail basées sur des droits sociaux et une protection sociale minimum… Ceux des auto-entrepreneurs ! Alors que ces « auto-entrepreneurs » sont, du point de vue du droit du travail, dans une situation avérée de salariat et devraient donc bénéficier des droits sociaux et des protections sociales de toute personne salariée. Avec le numérique, tout est possible... Avec les technologies de l’information et de la communication, tout devient possible... L’objet de cette contribution n’est en rien de critiquer le numérique et les apports qu’il a ou pourrait avoir en terme de relations sociales, de démocratie et de partage mais de pointer qu’il permet aussi de contourner les modèles sociaux et les formes de travail des plus protégées, et les droits qui leur sont attachés. Les plateformes numériques mettent à l’épreuve le droit du travail. Il existe aujourd’hui plusieurs types de plateformes numériques. Cependant, elles peuvent être classées en deux grandes catégories  : 1. les plateformes numériques désintéressées où l’objectif est l’échange d’idées, de services ou de biens n’est pas monnayé ; 2. les plateformes marchandes de biens ou de services Ces plateformes marchandes de biens ou de services posent de nombreuses questions : 1. la question de la monétisation des relations sociales. Tout s’achète et se vend, même entre particulier : le covoiturage, le coup de main « bricolage », ou le logement pour ses vacances ; 2. la question du travail déguisé ; 3. la question des nouvelles formes de travail induites par ces plateformes : l’auto entreprenariat ou la délocalisation du travail C’est cette dernière question sur laquelle cette contribution porte. Déconstruire les représentations. Il existe deux types de plateformes marchandes : les plateformes d'échange commercial de biens ou de services et les plateformes d’intermédiation entre des personnes (morales ou physiques) et des travailleurs indépendants, souvent en France, des auto-entrepreneurs. C’est le cas des plateformes Uber ou Deliveroo. En plus de recréer un travail à la tâche, de recourir au marchandage de la force de travail et de favoriser l'atomisation des travailleurs, ces plateformes s’exonèrent du droit du travail. En effet, la relation qu’elles entretiennent avec les entrepreneurs dits indépendants est une relation employeur-salarié. Ces plateformes devraient être requalifiées en qualité d’employeur pour trois raisons. Au regard du droit du travail, la situation de salarié s’analyse à partir de trois pouvoirs que l’employeur exerce sur le salarié : le pouvoir de contrôle le pouvoir de direction le pouvoir de sanction Or les plateformes exercent ces trois pouvoirs sur les travailleurs indépendants qu’elles ont dans leur réseau. Elles assurent un pouvoir de contrôle en contrôlant ou plafonnant les prix (le prix fixé par l’auto entrepreneur n’est pas libre), par le paiement à la satisfaction ou encore la mise en place de systèmes d’évaluation qui permet à la plateforme de noter le travailleur.. Elles exercent un pouvoir de sanction parce qu’elles ont la possibilité de désactiver les comptes de leurs livreurs (Deliveroo) ou de leurs chauffeurs (Uber) s’ils ne donnent pas « satisfactions » ou s’ils refusent une mission. De plus, les travailleurs indépendants mal notés ont « les courses » ou « les commandes » les moins rémunératrices… A l’inverse, les mieux notés sont privilégiés. Enfin, elles exercent leur pouvoir de direction en choisissant à quels livreurs ou à quels chauffeurs, elles vont attribuer telles ou telles commandes et sur quels horaires ; cette attribution se faisant notamment à partir de la notation acquises mais aussi par exemple de la rapidité des courses ou commandes effectuées... Les mécanismes de relations et de contraintes qui s’opèrent entre les plateformes et les travailleurs dits indépendants sont donc assimilables à une situation de salariat. Cependant, ces plateformes passent du temps, de l’énergie et de l’argent à nier leur qualité d'employeur en se qualifiant comme intermédiaire, mettant « juste en contact deux personnes ». Le vocabulaire employé par ces plateforme vise à déqualifier leur qualité d’employeur : elles ne licencient pas, elles désactive le compte du travailleur ; elles parlent de mise en relation de partenaire ... Les 1ers états à avoir condamné ces pratiques sont la Californie puis Royaume-Uni. En Europe, la cours de justice européenne a rendu un arrêt dit « Édit Taxi contre Uber ». La cours européenne de justice n’est pas compétente pour traiter de la question de la requalification de auto-entrepreneuriat en salariat. Elle a jugé la saisie au regard du droit du transport. Cependant, dans son arrêté, elle affirme que « Quand un entrepreneur ne peut pas exister par lui même, on ne peut pas le considérer comme entrepreneur ».  Ces plateformes induisent aussi : une nouvelle disparition de la figure de l'employeur. Une accélération du déplacement des travailleurs vers l’auto-entreprenariat avec le sentiments que cette forme de travail rend plus libre ; Une déqualification du travail par le fait qu'il n'y a pas de rémunération juste et égale, et l’accès à des droits sociaux identiques pour tous les travailleurs ; De plus, ces plateformes mènent un combat politique et social pour imposer une dégradation des droits et des protections sociales, et des solidarités entre travailleurs et travailleuses en faisant la promotion de ces nouvelles formes de travail qu’elles présentent « facile » et « libre ». Pour ce faire, elles utilisent tous les moyens possibles : propagande, contenus ludiques, facilités d’emploi de leur outils… Elles sont de plus soutenues par les courants libéraux et facilités par les décisions politiques tant en Europe qu’en France. Enfin, on peut s’interroger si ces plateformes ne sont pas une forme d’avant garde d’un projet de dépassement du politique où le capital viendrait se substituer aux pouvoirs publics et aux corps intermédiaires pour gérer directement l’espace public et la société. Agir politiquement Les communistes doivent agir sur plusieurs axes : Agir pour déconstruire les représentations des citoyens sur ces plateformes, sur l’auto-entrepreneuriat et les nouvelles formes de travail ; Agir pour renforcer le droit du travail pour permettre la requalification de toute forme de travail contraint en salariat ; Agir pour renforcer les textes législatifs qui interdisent le travail masqué et le recours d’entreprises au travail précaire comme l’auto-entreprenariat (ou l’intérim) ; Agir pour favoriser la construction de plateformes collaboratives publiques ou privées favorisant la coopération, le partage égal de la valeur et la gouvernance de ces plateformes par ceux qui en bénéficient d’abord.