Nouveaux modèles d'organisation - Congrès PCF

La démocratie dans le Parti

Il ne faut pas confondre fonctionnement démocratique et vote. Si le fait de voter garantissait un fonctionnement démocratique, la Vème République serait un régime éminemment démocratique puisqu'il y a quasiment une élection tous les ans. Or un ancien président, avant d'être élu, avait qualifié son fonctionnement de "coup d'état permanent" , c'est dire! Sous couvert de démocratie, de vouloir faire participer un maximum de communistes aux décisions, de permettre aux communistes qui sont isolés de participer à la vie du Parti, nous avons adopté depuis quelques années un fonctionnement dans lequel les communistes sont de plus en plus souvent consultés individuellement (questionnaires, votes divers et variés). Pour ce qui est de voter, nous votons! La vie démocratique du Parti s'en trouve-t-elle améliorée? A mon sens, non. Car l'essence même de la démocratie c'est le débat, les échanges collectifs : ce n'est pas le fait de voter ( même si à un moment donné il faut trancher et adopter des décisions et que là, le vote est un bon outil). C'est dans les échanges collectifs, les débats que les communistes élaborent leur réflexion et leurs analyses, sur la base desquelles ils pourront ensuite prendre des décisions et élaborer des stratégies. Quand je parle d'échanges collectifs et de débats, je n'ai pas en tête la lecture de contributions, aussi interessantes soient-elles, mais bien des échanges et des débats oraux. Je suis en cela d'accord avec la contribution de Hélène Mendelson Bougault intitulée "Formation permanente" publiée "la formation des communistes", les réunions sont des temps de formation grâce aux débats qui s'y déroulent et qui permettent à chaque communiste d'aiguiser ses capacités d'analyse et de reflexion. Si l'on veut réellement améliorer la démocratie dans le Parti, il faut sérieusement revoir le déroulement des Congrès, moments forts de la vie démocratique du Parti, du moins en principe. Un coup d'oeil sur le déroulement de ce Congrès extraordinaire est édifiant : D'abord, l'élaboration de la base commune : l'intention est louable, faire participer un maximum de communistes à l'élaboration de la base commune via un questionnaire, puis la mise en place de "chantiers", qui doivent en principe permettre aux communistes de ne pas se trouver face à une"masse de documents souvent indigestes, ou simples spectateurs d'affrontement d'initiés entre divers groupes". Concernant le questionnaire, sa forme relevait du sondage et comme dans tout sondage la formulation des questions, ou des éléments devant être considérés comme relevant des questions à traiter lors du Congrès, n'est pas neutre et induit en partie les réponses. Il faut un solide bagage politique pour lire ce que sous-entendent les questions, et arriver à ne pas se faire manipuler. Concernant les "chantiers", là, pour ce qui est de la masse de documents indigestes, on est servi! Et en plus il faut les lire sur un écran, ce qui ne facilite pas la tâche (sans compter qu'il n'est pas possible pour ceux qui envoient une contribution ou qui en commentent une d'élaborer une mise en page pour faciliter la lecture). Sont donc exclus de fait tous les camarades qui ont un rapport compliqué à l'écrit, ceux-là même qui ont le sentiment de se retrouver devant une "masse de documents indigestes" et se sentent "simples spectateurs d'affrontement d'initiés". Sans compter qu'en plus des capacités de lecture, il faut avoir des capacités en informatique (et je ne parle pas d'avoir accès à un ordinateur, un abonnement internet... ) En plus, le côté informel des chantiers ne facilite pas la mise en place de débats structurés. Concernant la base commune qualifiée de "masse de documents indigestes", certes elle est d'une lecture ardue et demande une solide formation universitaire ou bien une solide formation militante pour être non seulement lue mais décortiquée, mais une version light induirait aussi une pensée light. Les communistes ne peuvent pas se le permettre. Les débats autour de la base commune sont essentiels pour que un maximum de communistes puissent effectivement s'approprier les textes, saisir pleinement tous les enjeux et se faire leur propre opinion. Dans ces débats le rôle des camarades ayant une solide formation universitaire et/ou militante est primordial. Leurs analyses des textes et les débats contradictoires qui en découlent aident l'ensemble des camarades à saisir les enjeux, à se faire une opinion et à entrer dans le débat. Mais il faut pour cela de vrais débats et donc du temps pour les discussions. Penser demande du temps, surtout quand on n'a pas une solide formation universitaire et/ou militante. J'en reviens là à la phase statutaire de la préparation du Congrès. Il va falloir attendre début juillet pour avoir toutes les bases communes entre les mains. (il n'y aura pas un casse-croute mais plusieurs, qu'il va falloir analyser finement pour saisir où se trouve(nt) le ou les points d'achoppement. C'est vrai que pour perdre en chemin des communistes, il n'y a pas mieux!). Le vote sur le choix d'une base commune aura lieu début octobre, donc 3 mois de discussions et de débats acharnés dans le Parti. Trois mois super! Nous aurons vraiment le temps de discuter. Sur les trois mois, juillet et aout sont bien connus pour être des mois d'intenses activités militantes, de réunions non-stop (Le gouvernement en sait quelque chose, chaque fois qu'il veut faire passer un mauvais projet c'est toujours en juillet-aout). Donc la discussion sera limitée concrètement à septembre. (Oh zut! septembre, c'est aussi la préparation de la fête de l'Huma!) Les Congrès locaux et départementaux commencent à partir du 15 octobre. Les discussions sur la base commune proprement dite réduites à à peine deux semaines. Faire vivre la démocratie dans le Parti demande donc une modification radicale des modalités statutaires de la préparation du Congrès pour laisser une vraie place à la reflexion et aux discussions et ainsi permettre au maximum de communistes d'être les acteurs du congrès. Améliorer la démocratie dans le parti, c'est organiser les conditions pour que tous les communistes puissent prendre part aux discussions (au quotidien et pas seulement au moment des congrès). Cela demande de prendre le temps de débattre bien sûr, mais peut-être aussi de mener les réunions un peu différemment. Souvent les réunions se déroulent sur le schéma suivant : un compte-rendu suivi d'un débat. Le camarade chargé du compte-rendu essaie de mettre en avant les questions politiques importantes du moment, qui nécessitent à ses yeux une analyse de la part de l'ensemble des communistes. Les camarades qui prennent ensuite part au débat sont souvent toujours les mêmes, ceux qui manipulent bien la langue et les idées. Les autres écoutent. Ce qui ne veut pas dire qu'ils ne pensent pas et qu'ils n'ont rien à dire ! Prendre la parole en public quand on n'en a pas l'habitude simplement c'est difficile. Je pense que ce fonctionnement est à revoir pour plusieurs raisons. D'abord souvent le compte-rendu est totalement soporifique. Lire un compte-rendu de manière vivante, c'est loin d'être évident. Ensuite si les questions mises en avant dans le compte-rendu semblent importantes aux yeux de celui qui le fait, elles ne le sont pas forcément aux yeux de l'assemblée, du moins pas forcément sous cette forme-là, et alors le débat part sur les questions qui sont dans la tête des camarades. Enfin, comment faire pour que tous les camarades s'expriment et expriment ce qui les préoccupe ? Peut-être que plutôt qu'un compte-rendu soporifique de plusieurs pages, une question ouverte sur l'actualité avec des éléments de réflexions amenés au cours du débat pour permettre d'approfondir serait plus efficace. Une bonne question ouverte, c'est une question qui peut être répétée et qui garde toute sa pertinence. Le fait de répéter la question permet à tous d'avoir le temps d'élaborer une réponse. C'est bien sûr plus compliqué que de lire un compte-rendu, mais en même temps les éléments pour approfondir le débat ne sont pas forcément amenés seulement/forcément par le camarade qui anime la réunion et si cela permet un débat large, vivant et riche, cela peut en valoir le coup.