Notre démarche stratégique de transformation et de rassemblement, sur la base d'un bilan de la période écoulée et des enjeux de la période nouvelle - Congrès PCF

POUR UNE STRATEGIE AUTOGESTIONNAIRE

LA PETITE MUSIQUE DE PIERRE LAURENT. Pierre Laurent, Secrétaire Général en exercice de notre Parti, vient de se fendre pour cette rentrée de Mars d’une « contribution d’étape » diffusée à tous les communistes via les Fédé et les Sections. Il en est des plus égaux que d’autres, manifestement, et Pierre Laurent le revendique fièrement : il décrète que « le travail approfondi dont nous avons besoin passe par l’expression de l’opinion de dirigeants », de son opinion à lui en tout cas. Au cas où on aurait du mal à réfléchir par nous-mêmes, ou justement parce que l’on se mettrait à avoir des pensées pas autorisées ? C’est décidément un Congrès extraordinaire, dont les règles du jeu sont tordues au jour le jour par le Secrétaire Général et sa garde rapprochée, au gré de leurs humeurs et sans que le Conseil National ait plus son mot à dire depuis belle lurette. Pierre Laurent annonce son souci d’une « redéfinition de notre démarche stratégique », et il se débrouille pour qu’au bout de neuf pages de considérations foisonnantes on ne soit pas plus éclairés sur la démarche stratégique qui prévalait jusqu’alors, ce qui a été mis en œuvre ou pas de cette stratégie, les causes et les responsabilités, dans quel sens faut-il infléchir ou transformer la stratégie, les conséquences politiques, militantes et organisationnelles de ce renouveau stratégique. Tout ça pour ça : rien sur le bilan stratégique, rien sur le bilan politique, rien sur rien. Ca valait bien la peine de se saisir du micro. Ca rappelle le bon Robert Hue, à l’époque où il sévissait comme Secrétaire Général lui aussi, qui se fendait de proclamations ferventes sur « la mutation nécessaire du Parti » : mutation de quoi précisément, on n’a jamais su, il fallait donner l’illusion d’un renouveau, on entendait déjà des velléités de changer le nom du Parti, ce genre de choses, bref tout changer pour que rien ne change, la Place du Colonel Fabien bruissait de réceptions où défilaient les people à la mode, c’était la modernité en marche, avec paillettes à gogo. On a vu où ça nous a menés, et où ça a mené Robert Hue : après avoir adoubé Marie-Georges Buffet, ex-icône du sport, qui adoubera elle-même Pierre Laurent, ex-journaliste occasionnel, Robert Hue appelait à voter Macron dès le premier tour des présidentielles de 2017, toujours un temps d’avance sur tout le monde, un véritable visionnaire. Ca devrait nous donner à réfléchir. Après avoir proclamé haut et fort « notre besoin de redéfinir notre démarche stratégique… qui passe par un bilan critique », Pierre Laurent esquive aussitôt d’une pirouette pour éluder tout bilan et rester vague sur la question stratégique : « je ne réduis pas le débat stratégique à la seule évaluation de notre bilan ». Donc pas de bilan stratégique, et puis tant qu’à faire pas de bilan non plus de notre déficit de soutien à l’intervention démocratique des gens, de notre électoralisme compulsif, de notre déconfiture dans la bataille des idées. Trois pages plus loin, Pierre Laurent donnera le coup de grâce au bilan en quelques considérations distinguées sur nos derniers déboires électoraux, mis sur le compte du tropisme des Présidentielles ; il fut pourtant une époque, sous la même Constitution, où le Parti présentait des candidats et où l’on faisait 20% des voix, mais c’est peut-être hors sujet puisqu’on est censés ne se référer qu’à la « dernière période ». Dans la foulée, Pierre Laurent enterre sous trois pelletées de sable le cercueil de la stratégie : 1°/ « notre stratégie n’est pas un programme, c’est une stratégie de mouvement permanent » : on ne sait toujours pas ce qu’a été, ce qu’est ou ce que devrait être notre stratégie, mais au moins on sait ce qu’elle n’est pas. 2°/ « l’émancipation des travailleurs sera l’œuvre des travailleurs eux-mêmes » : mais on en était déjà là au XXII° Congrès du Parti en 1976, et on en était déjà beaucoup plus loin au XXIII°, en définissant le rôle du Parti au service des luttes transformatrices. La question est précisément de savoir pourquoi en 40 ans on semble avoir fait du surplace en matière de mise en œuvre stratégique, perdu passablement nos marques et beaucoup perdu de crédit auprès des travailleurs dans l’intervalle. 3°/ « le travail d’identification des batailles potentiellement transformatrices est à entreprendre » : Pierre Laurent ne se demande pas pourquoi le Parti, sous sa responsabilité et depuis de longues années, n’a pas su « identifier les batailles potentiellement transformatrices » qu’il convenait d’entreprendre. Il passe directement au plan B, et propose en guise de solution de ramener les batailles transformatrices à trois domaines de lutte privilégiés : l’écologie, l’antiracisme et la création d’une branche spéciale de la Sécu pour les EHPAD, représentatifs selon lui « d’une société d’humanité que nous nommons communisme » (pauvre communisme, on l’aura décidément mis à toutes les sauces). Pas la précarisation massive de l’emploi, pas la régression à marche forcée des droits salariaux, pas le logement trop rare et trop cher, pas la pauvreté qui enfle, pas les retraites en berne, pas les rackets sur la santé, pas la justice à deux vitesses, l’éducation à trois vitesses, non : surtout pas des questions qui fâchent. Pierre Laurent préfère que les « batailles transformatrices » soient cantonnées aux sujets hyper-consensuels, qui ne s’attaquent pas aux forces de l’argent, qui permettent de passer en prime time sur TF1, et qui évitent la confrontation de classe. PIERRE LAURENT ET LA TRANSFORMATION SOCIALE. Du coup on s’interroge sur la conception que Pierre Laurent peut avoir de la transformation sociale : on voyait plutôt le financement des EHPAD comme la satisfaction d’un besoin social et sanitaire massif, qui nécessite de gagner un meilleur rapport de force dans la redistribution des richesses, mais pas forcément comme un combat transformateur par lui-même, car il ne remet pas nécessairement en cause les rapports d’exploitation et de domination, loin s’en faut. Une branche spéciale de la Sécu financée par quoi, à l’heure où le pouvoir détricote tout le système contributif, généralise les ‘’allègements de charges’’ et les cadeaux aux employeurs ? Avec de nouvelles augmentations de la CSG ou avec une augmentation des retraites ? Avec quelle réglementation sur les prix ? Dans le cas précis, les capitaux qui font leur chou gras avec les EHPAD sont totalement favorables à ce que la Sécu dispose de plus d’argent à injecter dans les tuyaux, comme les rentiers de l’immobilier ont porté l’APL sur les fonts baptismaux. La question du financement des EHPAD (et plus largement du logement et des soins aux seniors) est une question de société dans le sens où la redistribution doit s’adapter à la réalité d’une tranche d’âge de non-productifs en expansion rapide avec des besoins spécifiques. Mais cela peut se faire de multiples manières, plus ou moins favorables aux intérêts populaires ou aux intérêts de l’argent. L’action transformatrice ne consiste pas à créer ou à défendre un service public, mais doit porter sur son contenu, son économie, le pouvoir de décision. Il en est des EHPAD comme de l’écologie et de l’antiracisme : l’expérience a montré que le sociétal est parfaitement soluble dans le capitalisme, il lui offre même de nouveaux masques et il favorise sa reproduction élargie. Il n’y a qu’à voir ce que sont devenus les principaux chantres de l’écologie et de l’antiracisme en France : c’est un florilège d’arrivisme et de carriérisme, qui a régulièrement contredit et trahit les idéaux affichés. Et n’en déplaise à Pierre Laurent, le service public, fut-il à la française, n’est pas la préfiguration d’une société libérée de l’exploitation, satisfaisant les besoins de chacun et assurant l’équité entre tous. Sinon la société suédoise serait le nec le plus ultra de la libération humaine, et on se serait gravement gouré dans notre combat depuis longtemps. Le service public n’est qu’un volet de la redistribution qui assure la cohésion et le contrôle social dans une société capitaliste avancée, et c’est donc un terrain de lutte important sur lequel faire reculer l’exploitation et promouvoir la décision souveraine des gens, mais ce n’est pas le prototype d’une société libérée de l’exploitation, ne mélangeons pas tout. En guise de nouvelle mise en œuvre « stratégique », Pierre Laurent nous livre cette perle : « l’initiative communiste doit s’ancrer dans les luttes concrètes réelles. Nous devons réévaluer l’importance des élus, qui sont plongés au cœur de ces enjeux concrets de lutte ». Ah bon, parce que ceux qui sont placés au cœur des enjeux de lutte, ce ne sont pas les communistes dans leur quartier, dans leurs associations, dans leur entreprise ? Parce que sans les élus on ne peut plus respirer, on ne peut rien faire ? Oui pour le coup, il va falloir réévaluer sérieusement le rôle des élus communistes : est-ce que les communistes vont prendre l’initiative de développer les batailles d’idées auprès des gens, les entrainer à former des objectifs de lutte, les aider à agir collectivement de manière efficace, les habituer à décider par eux-mêmes des choses de l’entreprise et de la cité, ou bien est-ce que les communistes vont juste continuer à être les colleurs d’affiche d’élus qui vont réfléchir, intervenir et décider à la place des gens ? Attention, on fait une pause, on est sur un point crucial, et il est justement d’ordre stratégique : on développe un Parti qui aide les gens à prendre le pouvoir, ou bien on favorise la délégation de pouvoir en faveur d’élus institutionnels omniscients et omnipotents ? Intervention des gens ou délégation de pouvoir ? Autrement dit, on cherche à dépasser cette société de subordination et de déresponsabilisation par une démarche autogestionnaire (le mot est lâché) ou on conforte les rapports sociaux dominants en entretenant la délégation de pouvoir ? Ne contournons pas cette question et tout ce qui en découle, car c’est peut-être pour cela que l’on piétine depuis 40 ans. Pierre Laurent poursuit avec une page sur les échéances électorales à venir, grosso modo on continue comme avant. Et pour finir, deux pages bien senties sur « les transformations du Parti », ce qui est quand même assez gonflé : on ne sait toujours pas dire la « stratégie revisitée » qu’il nous faut, alors comment Pierre Laurent peut-il en déduire le type de Parti approprié à la mise en œuvre de cette stratégie ? Une avalanche de mots creux et de phrases convenues ne fait pas sens. On retiendra surtout les accents de reprise en main façon caserne, car c’est là qu’est le message principal : - « Une organisation territoriale qui soit une colonne vertébrale… mise en réseaux de militants ‘’spécialistes’’ en lien avec les élus… utilisation des réseaux numériques » : autrement dit pas d’élaboration par les communistes dans leurs cellules et leurs Sections en lien avec les gens là où ils vivent et où ils travaillent, mais des « think tanks » sous la houlette des élus et du Secrétaire Général, et des « plateformes Internet » où tout le pouvoir revient à l’administrateur, comme d’hab. - « Cantonner la diversité d’opinion à l’expression individuelle et rechercher un nouveau modèle de centralité » : qu’est-ce à dire ? Que chaque communiste est invité à n’échanger qu’avec lui-même ? Et est-ce notre système de « centralisme démocratique » qui n’est pas approprié, ou bien est-ce l’usage que l’on en fait qui est défaillant ? Là encore Pierre Laurent fait de l’impressionnisme à petites touches, il ne livre pas d’analyse, il insinue et il impose. - « Discuter des critères sur l’animation, le rôle des directions, leur composition, avant d’en venir au débat sur les noms » : sauf que Pierre Laurent a déjà annoncé haut et fort qu’il est candidat à sa propre succession. Ce faisant, il discute bien sur les noms, en tout cas sur le sien qu’il voudrait rendre incontournable, à défaut de bilan critique. DISSECTION D’UN ENFUMAGE. La chute de la « contribution d’étape » de Pierre Laurent entre en résonance avec la manière dont ce singulier Congrès Extraordinaire est concocté depuis le début. Avec les élections présidentielles et législatives du printemps 2017, la politique menée par le Secrétaire Général et ses proches dans la période du Front de Gauche se voyait infliger un désaveu majeur. Devant l’exigence de mise à plat, de réflexion critique, d’identification des responsabilités individuelles et collectives, Pierre Laurent a commencé au CN de Juin 2017 par tout renvoyer aux calendes, dans un Congrès Extraordinaire situé à une date indéterminée. Toute la suite n’a été qu’une succession d’astuces dilatoires, de leurres et de digressions en cascade. Une ’’Enquête consultative individuelle‘’ était lancée en Septembre 2017, censée « définir les thèmes prioritaires à discuter pour la préparation du texte de base commune qui sera soumis au Congrès ». Pourquoi ce souci d’exclure des sujets, pourquoi pas un Congrès où l’on parlerait de tout ? En fait tout le monde l’a bien compris, le questionnaire individuel n’était qu’une astuce en vogue chez les fabricants d’opinion : il s’agissait de faire passer le tri des sujets tabous et des sujets autorisés comme émanant des communistes, en orientant au passage l’expression de chacun par le contenu même des questions posées et des choix offerts, et en s’affranchissant de toute réflexion collective et de tout contrôle collectif au niveau des cellules, des sections, des fédérations et même du Comité national, lui-même majoritairement dessaisi de la conception comme du suivi de l’opération. Pour aller plus loin dans le dessaisissement du collectif militant du Parti, de son organisation et de sa démocratie interne, une Assemblée des délégués de Section était convoquée en région parisienne pour le 18 Novembre, avec une représentation bancale (un délégué pour une section de 25 adhérents, et seulement deux pour une section de 200) et surtout avec une totale absence de mandat : puisqu’il s’agissait de statuer à partir des résultats de l’Enquête consultative dont les résultats n’avaient pas été communiqués, les délégués ne pouvaient pas détenir de mandat de leur Section et ne représentaient qu’eux-mêmes, c’est-à-dire rien du tout face à « l’expression des communistes » expurgée du fameux questionnaire par les proches du Secrétaire Général. Il s’en est suivi la décision de fixer la date du Congrès à la fin de Novembre 2018, c’est-à-dire aussi loin qu’il était possible de le repousser sans tomber sur l’année du prochain Congrès statutaire. La discussion sur le bilan et sur la stratégie était reléguée au rang des accessoires, et à défaut du lancement d’un débat sur la ‘’base commune’’ par les communistes dans leurs cellules et leurs sections, on lançait à grand renfort de trompettes un blog Internet où les communistes étaient invités à s’épancher individuellement, les administrateurs se réservant le choix d’ouverture des rubriques. Bref le tour était joué : la discussion critique était renvoyée aux calendes, la réflexion collective des communistes était enrayée, voire proscrite, et les communistes en manque de débat étaient invités à bloguer sur des sujets distractifs, tels que ‘’La révolution numérique‘’, « Communication’’, ‘’La Formation des Communistes » », ‘’Elections Européennes 2019’’ et ‘’Nouveaux Modèles d’Organisation’’. Surtout pas le bilan critique de l’activité, la réévaluation stratégique, ou l’analyse de la dernière séquence 2016-2017 et des choix qui y ont présidé. Pour Pierre Laurent et ses proches, on l’a bien compris, la question essentielle c’est de ne pas avoir de comptes à rendre sur des épisodes qui fâchent, notamment celui de Novembre 2016, quand le Secrétaire Général, mécontent que le CN ait adopté le principe d’une candidature communiste aux présidentielles, a lancé une consultation directe des communistes (tiens, ça rappelle quelque chose) pour prendre le CN à contre-pied, et pesé de tout son poids en faveur du soutien à la candidature de JL Mélenchon (soutenu en cela par quelques stars locales comme MG Buffet). Pierre Laurent a obtenu gain de cause, fait désavouer (d’une courte tête) le CN par ‘’la base’’, et mis en piste JL Mélenchon, avec toutes les conséquences que l’on peut apprécier et qui étaient pourtant toutes terriblement prévisibles. Mais, comme disait Vladimir Illitch, les faits sont têtus, et malgré tout l’art des officines de communication, il faudra bien que l’abcès crève. Au CN le mécontentement contre les manœuvres se manifeste plus ouvertement depuis Janvier, le fameux blog sous influence laisse percer une demande insistante de débat sur le bilan et sur la stratégie (à tel point qu’une rubrique « Stratégie » a dû être ouverte après deux mois d’obstruction), ici et là les communistes, dans leurs cellules et leurs sections, organisent le débat sur la base commune, sur les orientations, sur les responsabilités, en même temps qu’ils développent l’action sur les droits salariaux, les retraites, le prix du logement, la santé, etc. La Direction se voit contrainte de jouer les pompiers : puisque le débat se noue malgré elle, il faut en prendre la tête et l’aiguiller. Les membres du CN ont ainsi découvert avec surprise que les proches de Pierre Laurent avaient concocté trois textes, jetés en pâture aux communistes pour les aider à réfléchir dans le bon sens : un texte sur « le projet communiste », un autre sur « conception et rôle du Parti communiste », un troisième sur « stratégie et rassemblement ». Une nouvelle fois ces textes n’ont pas été soumis ni approuvés par le CN, leurs auteurs restent anonymes et même si la forme est plus alambiquée, l’intention reste clairement de noyer le poisson. Le premier texte, aux accents fortement identitaires pour les besoins de la cause, vient nier la primauté des travailleurs dans le choix de société ; le second texte cherche à définir le Parti d’une stratégie qui reste à (re)définir ; le troisième texte enfouit le bilan stratégique loin vers la fin, ce qui le rend inopérant. Les Fédérations se sont vues invitées à organiser fissa des ’’journées d’étude’’ début Mars à partir de ces documents, en Fédé et surtout pas dans les cellules et sections. Et la « contribution d’étape personnelle » de Pierre Laurent est venue fermer le ban : il a son opinion sur tout, et maintenant on est pour lui ou contre lui, qu’on se le dise. QUE FAIRE ? Les semaines qui viennent vont compter double : si les communistes développent la réflexion dans leurs cellules et leurs sections, de manière structurée et en s’ancrant dans l’expérience concrète, s’ils décident ensemble d’orientations précises et s’ils prennent toutes dispositions pour faire remonter et pour partager au sein du Parti, les jeux ne sont peut-être pas faits, et il est encore possible que ce Congrès 2018 accouche d’un Parti efficace au service de la transformation sociale. Mais il ne pourra pas être le Congrès des demi-mesures : déjà le ton est donné, le premier défi est d’imposer la libre discussion des communistes entre eux et leurs choix collectifs, chacun comptant pour un, et le Secrétaire Général pas plus que les autres ; le second défi est d’imposer les thèmes de travail déterminants (quelle stratégie de transformation sociale ? quelle pratique politique ? quelle organisation ?), contre les digressions de tous poils, d’exiger la référence à du concret plutôt que des péroraisons, de voter à chaque étape et de contrôler que les décisions prises ne soient pas trahies ou dévoyées. Quand on prétend transformer cette société en agissant en faveur de la démocratie jusqu’au bout, il faut déjà être capables de le faire à l’échelle de notre propre (petit) Parti. Travaux pratiques. Ne pas craindre la confrontation, la critique, la désignation des responsabilités, l’adoption de mesures pratiques immédiates : il est normal que l’accouchement soit difficile et douloureux, il s’agit de se débarrasser de la vieille peau de la délégation de pouvoir qui nourrit encore bien son monde et d’idéaux renvoyant toujours au lendemain l’avènement du paradis sur terre, pour réaliser aujourd’hui même l’émancipation des travailleurs par leurs propres moyens, selon leurs propres besoins et leur propre imagination. Comment penser que cela pourrait se faire tout seul et gentiment ? Une idée directrice, pour ce qui me concerne : il n’y a pas de préalable à la transformation autogestionnaire de cette société, autres que de mener la bataille des idées avec constance et efficacité sur tous les terrains, sans préjugés et sans conformisme, organiser un Parti révolutionnaire qui va servir d’aide et de soutien permanents à la prise d’initiative et de responsabilité des gens là où ils vivent, combattre partout la dissimulation, la prise d’intérêt et la délégation de pouvoir, et faire confiance aux gens : la lutte ça rend intelligent et les gens sauront trouver les voies d’une société meilleure, libérée de toutes les formes d’exploitation et d’abus, ce qui en résultera ne sera pas le communisme ou quelque autre spéculation fumeuse, ce sera ce que les gens en feront, il faudrait commencer à nous habituer à ça. C’est mon ami William qui disait cela : « Le passé est le prologue, ce qui va venir est de notre responsabilité ». Franck Boyer, Section d’Uzès, Fédération du Gard.