Écologie, enjeux de classe et projet communiste - Congrès PCF

Rejets de gaz à effet de serre et Programmation Pluriannuelle de l'Energie

Révision de la PPE pour la période 2018 – 2023 Le président de la République a rappelé que l’objectif N°1 en matière de politique énergétique est la réduction des rejets de gaz à effet de serre (GES) dans l’atmosphère. C’est un engagement de la France suite à la « Conference Of the Parties » tenue à Paris en 2015 (COP 21). Dans le cadre de la loi de transition énergétique pour la croissance verte (LTECV), une stratégie nationale bas carbone (SNBC) orchestre la mise en œuvre de la transition vers une économie bas carbone. La Programmation Pluriannuelle de l’Energie (PPE) est un élément important pour la mise en œuvre de cette transition vers les objectifs annoncés de réduction des émissions de GES par rapport à 1990 : - Moins 40% en 2030, - Moins 75% en 2050. En conséquence, la révision de cette PPE pour la période 2018 – 2023 doit être examinée en fonction de cet objectif N°1. Situation actuelle D’après le document « Stratégie Nationale Bas-Carbone » publié par le ministère de la transition écologique et solidaire, la répartition des émissions de GES par secteur économique est la suivante : Secteur Mteq CO2/an Pourcentage Transports 138 30 Bâtiments 88 19 Agriculture et foresterie 92 20 Industrie 83 18 Energies 46 10 Déchets 18 4 Total 465 100 1 Mteq CO2 = 1 million de tonnes équivalent CO2 465 Mteq CO2 pour une population de 66,5 millions d’habitants, cela représente environ 7 teq CO2/ habitant/an. Dans ce total, la combustion des énergies fossiles (charbon, gaz et pétrole) compte pour environ 300 Mteq CO2/an, soit 4,5 teq CO2/ habitant/an. Depuis 1990, ces émissions ont baissé de 15%, soit environ 1%/an, essentiellement du fait de la baisse de 45% des émissions de l’industrie : cela correspond surtout à la délocalisation hors de France de nombreuses industries ayant entrainé la perte d’environ un million d’emplois industriels, et à de légers progrès dans l’efficacité énergétique pour certains procédés industriels. Depuis 2014, on constate une légère augmentation des rejets de GES due aux transports (+6%), aux bâtiments (+11%) et à l’agriculture (+3%). Utilisation des moyens financiers Le document sur la Stratégie Nationale Bas Carbone indique la répartition des moyens financiers dans l’ensemble des politiques publiques mises en œuvre pour atteindre les objectifs. En 2017 : Contribution au Service Public de l’Electricité (CSPE) 5 680 M€ Dépenses fiscales en faveur du climat 2 029 M€ Dépenses budgétaires pour la politique d’atténuation 1 360 M€ Dépenses budgétaires pour la politique d’adaptation 433 M€ Total 9 502 M€ 69% de la CSPE, soit 3 920 M€ sont liés au surcoût de l’électricité produite par les énergies nouvelles renouvelables (ENR), éolien, solaire, etc… et à l’obligation d’achat de cette production par EDF. Ainsi, 41% (3 920 / 9 502) des moyens financiers de la SNBC sont affectés au secteur « Energies » qui ne représente que 10% des rejets de GES dans l’atmosphère. Comme environ 90% de l’électricité est produite à partir des moyens « décarbonés » (nucléaire et hydraulique), cet important effort financier en faveur de la production d’électricité par le photovoltaïque et l’éolien ne peut pas avoir une grande efficacité pour atteindre l’objectif N°1 : réduire les émissions de gaz à effet de serre. De plus, les matériels nécessaires au photovoltaïque et à l’éolien sont très majoritairement importés, ce qui aggrave le déficit de la balance commerciale. Enfin, ces moyens de production d’électricité photovoltaïque sont aléatoires et intermittents en fonction des conditions météorologiques. Donc, pour la tenue de l’équilibre consommation-production du réseau électrique, ils nécessitent des moyens supplétifs pilotables (nucléaire, hydraulique, thermique à combustibles fossiles, …) pour les remplacer quand leur production est faible. La poursuite de leur déploiement en France conduit à l’augmentation du coût de l’électricité (voir l’évolution de la rubrique CSPE sur les factures) pour les usagers domestiques et industriels. L’exemple de la politique du tournant énergétique (die Energiewende) conduite en Allemagne depuis plus de 15 ans est une remarquable démonstration : la puissance installée en moyens de production photovoltaïque et éolienne (100 GW) est supérieure à celle du parc nucléaire français (63 GW). Cette puissance en ENR fournit 30% de l’électricité allemande à comparer aux 75% de l’électricité française fourni par le nucléaire (les consommations d’électricité par habitant sont du même ordre dans les deux pays). Les résultats sont : l’électricité est presque deux fois plus chère et les rejets de gaz à effet de serre par habitant sont deux fois plus élevés en Allemagne qu’en France. Le coût de l’Enegiewende est évalué à 600 milliards d’Euros sur 15 ans, supportable par ce pays dont la balance commerciale est très excédentaire à l’inverse de celle très déficitaire de la France. Orientations proposées Pour atteindre les objectifs de réduction des rejets de GES, il semble impératif de faire porter nos efforts à l’avenir sur les secteurs économiques les plus émetteurs de ces gaz : le secteur « transports » et le secteur « Bâtiments résidentiel et tertiaire », gros consommateurs de combustibles fossiles (pétrole et gaz). Compte tenu de la structure actuelle de ces deux secteurs, ces efforts seront coûteux et longs pour arriver à bon terme. Il est donc important de commencer sans tarder, en révisant la programmation pluriannuelle de l’énergie pour la période 2018-2023 en conséquence. Les transports sont le premier secteur en consommation de produits pétroliers. Pour réduire leurs rejets de GES (sans oublier les autres polluants rejetés dans l’atmosphère), il faut amorcer une inversion des tendances à l’œuvre depuis des décennies : - Réorganiser complètement le transport des marchandises : développer les moyens « multimodaux », les véhicules routiers « propres » pour les courtes distances (livraison), le fret ferroviaire électrique pour les distances moyennes et longues et la voie fluviale pour les matériaux pondéreux, réduire la part du transport routier pour les longues distances, - Redynamiser le transport ferroviaire électrique des personnes en améliorant le service aux usagers et en rationalisant les conditions tarifaires anarchiques actuelles, - Développer les transports collectifs des villes et métropoles en assurant une meilleure desserte et une meilleure coordination entre les différents modes. Les bâtiments résidentiels et tertiaires sont aussi de gros utilisateurs des combustibles fossiles (gaz et pétrole). Les efforts doivent être accrus pour : - L’isolation thermique des bâtiments anciens, ce qui nécessite des financements très importants, - La construction des bâtiments neufs aux normes de haute qualité environnementale (HQE), ce qui augmentent les coûts au m2, - Le remplacement des moyens de chauffage à combustibles fossiles (gaz, pétrole) par des moyens utilisant l’électricité produite de manière décarbonée : ceci nécessite de modifier la réglementation thermique RT 2012 qui contribue à favoriser le chauffage au gaz depuis plusieurs années. Ces efforts importants pour les secteurs « Transports » et « Bâtiments » auront un effet favorable pour réduire le déficit de notre balance commerciale, constitué en grande partie par la facture de nos importations de combustibles fossiles (pétrole, gaz, charbon). Le « bouquet » énergétique doit donc évoluer. La part de combustibles fossiles (pétrole, gaz, charbon), environ 65% de l’énergie finale consommée actuellement, doit être réduite. La part de l’électricité produite par des moyens décarbonés (nucléaire, hydraulique, éolien, photovoltaïque,…) augmentera, même en tenant compte des progrès en efficacité énergétique. Les différents moyens décarbonés de production de l’électricité sont à coordonner pour assurer la stabilité du réseau (équilibre production / consommation) et la qualité du service aux usagers domestiques et industriels. Pour compenser les inconvénients de l’intermittence des moyens de production ENR (photovoltaïque, éolien, …), il est nécessaire de : - Disposer d’une puissance installée en moyens pilotables décarbonés (nucléaire, hydraulique, stockage,…) capables d’assurer le service lors des minimas de production des moyens intermittents, - Prévoir l’avenir pour le remplacement des moyens pilotables actuels arrivant en fin de vie : o Construction de nouvelles unités nucléaires aux caractéristiques améliorées sur les aspects fiabilité et sûreté, o Poursuivre le développement de réacteur nucléaire de 4ème génération en lançant la construction du prototype ASTRID (Advanced Sodium Technological Reactor for Industrial Demonstration) : ce type de réacteur permettrait d’utiliser les importants stocks d’uranium appauvri (issu de la fabrication d’uranium enrichi en son isotope U235) et d’uranium issu du traitement des combustibles usés des réacteurs actuels. Ces stocks conservés en France représentent un potentiel de plus de 1000 ans de la production électrique actuelle du pays. o Développer les recherches sur de nouveaux moyens de stockage de l’électricité, en complément des stations de transfert d’énergie par pompage (STEP). Pilotage de la politique énergétique de la France L’idéologie dominant la politique européenne actuelle conduit à un grand désordre, voire une quasi-anarchie, notamment dans le domaine des énergies en réseau (électricité, gaz,…). Les directives de la Commission Européenne appliquant cette idéologie (« Le marché doit tout régler … ») ont conduit à une dégradation des services rendus aux usagers dans le secteur énergétique, notamment en France. De plus, manifestement, elles ne conduisent pas les pays européens, et par conséquent l’Europe entière, à tenir leurs engagements pris lors de la COP 21, pour la réduction des rejets de gaz à effet de serre dans l’atmosphère. Néanmoins, chaque pays et notamment la France, conserve le choix des moyens à mettre en œuvre pour respecter ses engagements. Notre pays doit redresser la situation en reprenant une maîtrise complète de l’ensemble du secteur des énergies, et pas seulement de l’électricité. Cela permettrait de coordonner efficacement tous les acteurs pour une politique énergétique apte à atteindre les objectifs environnementaux, économiques et sociaux, dans le sens de l’intérêt général. Jean-Michel GAMA – 02/03/2018