Europe : ne cassons pas le fil d’Ariane
Arianegroupe, filiale d’Airbus group vient de décider de supprimer 2300 emplois soit ¼ de ses effectifs. Alors que le spatial est déjà un enjeu majeur du XXIe siècle dans tous les domaines et en particulier celui de la crise climatique ; alors que les États-Unis, la Chine, la Russie investissent et développent comme jamais dans leurs industries spatiales nationales, l’Europe se tire une fois de plus une balle dans le pied en détruisant un savoir faire et des compétences si durement acquis.
Une fois de plus de plus, de manière suicidaire, l’Europe fait le choix du capital financier au détriment du capital humain.
C’est d’autant plus rageant qu’avec les programmes Ariane puis Ariane 5 et grâce à l’action des agences publiques que sont le CNES (Centre nationale d’études spatiales) et l’ESA (Agence spatiale européenne), l’Europe avait rattrapé et dépassé les États-Unis et la Russie dans le domaine des lanceurs spatiaux. Ce résultat avait été obtenu par une coopération intergouvernementale européenne assise sur des entreprises industrielles qui, à l’époque, étaient essentiellement à capitaux publics. La réussite d’Ariane montrait ainsi ce que pourrait être et faire une Europe qui serait une union de peuples libres et égaux, c’est-à-dire l’Europe que nous appelons de nos vœux avec Ian Brossat.
Malheureusement, nous avons une Europe de la finance et de la « concurrence libre et non faussée », sans projet industriel. Résultat : on a privatisé la filière aérospatiale, on a retardé le programme Ariane 6 pour des raisons d’austérité budgétaire et de recherche de profit maximum pour un investissement minimum. On a laissé les États-Unis rattraper leur retard en subventionnant l’entreprise SpaceX d’Elon Musk de manière massive et détournée. En effet, SpaceX a cassé les prix des lancements de satellites grâce à des commandes massives aux prix forts de la NASA et du Pentagone, alors que dans le même temps, l’Union européenne faisait lancer une grande partie de ses satellites par des lanceurs russes ou américains. Les dirigeants américains, assumant - d’Obama à Trump - de vouloir « faire la peau aux européens en les nettoyant du domaine spatial».
C’est pourquoi, pour notre Congrès comme pour les élections européennes, la question d’une politique et d’une stratégie industrielle nationale comme européenne est une bataille décisive.
Sans politique de développement industriel,nous serons condamnés à acheter les politiques publiques que voudrons bien nous vendre les groupes industriels outre-atlantiques ou chinois.
Yann Le Pollotec