Villes et quartiers populaires: l'enjeu d'une proximité concrète
La défiance envers la politique s'est accrue considérablement ces dernières années dans les villes et quartiers populaires. Elle se manifeste bien-sûr par des taux d'abstention vertigineux lors des scrutins électoraux.
A l'élection présidentielle de 2017, la participation était ainsi moindre de 20 points, par rapport à la moyenne nationale, parmi les populations les plus pauvres et lors des dernières législatives les taux d'abstention dépassaient souvent les 70%. Le sentiment d'avoir souvent été bafoué par des promesses non tenues, d'être en but à la stigmatisation récurrente quand seule la violence des quartiers fait la une des médias participent de cette lassitude et de l'indifférence désabusée, évidemment.
Comment dès lors, quand les conséquences de l'austérité durcissent plus encore le quotidien de familles précarisées recréer un lien, un dialogue qui suscitent une prise de conscience d'un pouvoir citoyen possible. Car c'est bien l'un de nos objectifs essentiels, faire que chacun, chacune puisse prendre conscience qu'en étant parti prenante d'un pouvoir d'agir, de se mêler, de proposer, de décider, le rapport de force alors peut s' inverser. Cet engagement dans le débat et la prise de décision citoyenne bien-sûr ne se fait pas en un jour, en particulier dans des cités où le peuple est en prise au quotidien pour lutter pour sa survie, avec des difficultés sociales cumulées, des taux de chômage exponentiels, des jeunes en échec scolaire... Mais il est plus que jamais de la responsabilité d'une organisation de terrain comme la nôtre d'y travailler. Le retissage de liens, petit à petit, passe par une proximité étroite, au cœur des quartiers, immeuble par immeuble, et à partir de batailles concrètes en prise directe avec la vie réelle des habitant·e·s. C'est déjà le cas, dans beaucoup de villes et quartiers populaires où les communistes expérimentent à partir de nos batailles concrètes pour la défense des services publics de proximité, contre les conséquences de l'austérité sur le logement par exemple, alors que les bailleurs sociaux ralentissent déjà leur programme de rénovation.
Les camarades de l'Essonne ainsi témoignent de l'impact de portes à portes minutieux, par exemple à Grigny dans un des quartiers les plus pauvres comme La Grande Borne. En y proposant de signer la pétition contre la fermeture de plusieurs hôpitaux publics, ils ont réussi à entamer des échanges qui ont créés une envie de mobilisation concrète. Les conséquences de la casse de l’hôpital public sont d'emblée audibles par toutes et tous, et beaucoup des habitant·e·s prennent conscience alors que leur parole, le geste de signer déjà, pour certains de se joindre à d'autres dans un comité de défense peut créer un levier de pression citoyenne. On a pu voir aussi dans le Val de Marne, pour s'élever contre les mesures d'austérité qui contraignent les municipalités dans leurs investissements de services publics, les élus et militants communistes en appeler à la mobilisation de la population. Cela passe là encore par un travail de proximité ténu, de rencontres, d'explications des mécanismes qui entament peu à peu le tissu de services et d'aides dus à la population et tout particulièrement celle en difficulté. Cet appel à soutien et à mobilisation a largement été entendu, ce qui souligne d'ailleurs aussi combien le rapport des élus communistes avec les citoyens s'inscrit dans la construction commune. A l'initiative des communistes de Champigny par exemple, ce sont 30 000 personnes qui ont signé pour défendre leurs services publics. Bien d'autres exemples existent ailleurs, où le travail des militant·e·s communistes dans le maillage très serré d'un quartier réussit à vaincre le sentiment de fatalité et d'abandon pour se transformer en envie d'agir, de faire entendre sa voix, de peser dans la décision. Il revient à chaque structure locale, d'organiser au mieux ce rapport de proximité selon sa réalité territoriale et les batailles concrètes les plus urgentes. Pour autant, ces succès sont aussi lourds de responsabilité, car les liens ainsi recréés ne sont pas affaire d'une seule bataille mais d'une construction au long cours pour que cette confiance dans le pouvoir d'agir, et de décider deviennent le moteur d'une transformation sociale et démocratique. Cela pose la question de notre capacité à donner des suites aux contacts ainsi créés ou recréés, c'est un des enjeux de transformation de notre organisation pour ce faire dont nous devrons débattre dans notre prochain congrès.
Laurence Patrice
Animatrice réseaux des adhérents
Vie du Parti